Comment tirer profit du téléphone portable pour développer le Congo Brazzaville ?
Le secteur de la téléphonie mobile a connu au Congo un développement spectaculaire et les abonnements dépassent les prévisions les plus optimistes des opérateurs qui sont confrontés à des saturations et donc à des contraintes d’urgence d’extension. La croissance moyenne de la pénétration cellulaire au cours des cinq dernières années sur le continent africain est estimée à 76%. En 2009, le taux de croissance annuel des abonnés mobiles a été estimé par l’Union Internationale des Télécommunications (UIT) à plus de 40%, l’Afrique reste donc un marché très porteur pour les communications mobiles. Le Congo Brazzaville, fait partie des pays qui profitent de l’essor des usages des technologies de l’Information et de la communication.
Mais si une bonne partie de la population a acquis le téléphone mobile, les usages restent limités c’est-à-dire : émission et réception des appels même si on voit ici et là l’apparition de nouveaux services : double appel, renvoi automatique, identification de l’appelant, restriction d’appels (etc.).
Les congolais s’envoient des messages textuels sur le territoire, ils en reçoivent des membres de leur famille qui vivent à l’étranger. L’utilisation d’Internet se limite à la consultation de la messagerie électronique, les congolais ne sont pas informés des interactions qui existent entre les deux médias. Or ceux-ci permettraient aux petits consommateurs d’avoir une autre utilisation de leur appareil et de ne pas forcément se tourner, à défaut de pouvoir acheter une recharge.
La question principale est comment faire en sorte que la population congolaise tire un maximum de profit de l’outil formidable qui constitue le téléphone portable ? Telle est la été notre contribution au forum de l’économie numérique organisé par l’association SDA en France le 29 mai 2011.
Nous avons entrepris une réflexion et mis en place un projet ont l’objectif principal est de profiter des potentialités du téléphone mobile pour diffuser des informations à caractère formatif, informatif, culturel, environnemental et de santé publique.
Nous avons en septembre 2010 initié un projet entre l’Université de Versailles Saint Quentin en Yvelines et l’Ecole Supérieure de Technologie du Littoral de Pointe Noire Congo, qui est en partenariat avec l’IUT d’Evry et qui l’une des rares écoles au Congo à proposer des formations en Génie des Réseaux télécommunications, en génie des systèmes industriels et en génie des systèmes en réseau (GSR) et Génie en environnement et en énergies renouvelables de l’hygiène sécurité et environnement, domaines dans lesquels le Congo manque cruellement de personnels compétents.
L’étude mise en place sous forme de projet tuteuré entre les deux institutions avait pour but d’analyser la faisabilité de la mise en place de services innovants via le téléphone mobile. Cette étude s’est faite en deux étapes, un état des lieux des services proposés par les opérateurs mobiles et les innovations possibles.
En matière de formation à distance : le mobile e-learning
Depuis quelques années la formation à distance est devenue un phénomène de société, la multiplicité des supports et le développement des techniques et technologies font de celle-ci un enjeu majeur. Cette situation vise d’abord une ubiquité que l’enseignement classique ne peut toujours assurer. Par contre, cette quasi-absence de temps et de la distance permet de nouvelles modalités d’expression et d’apprentissage où les supports sans fil prennent de plus en plus l’avantage sur l’ordinateur. Il s’agit d’étoffer l’offre de formation à moindre coût, ces nouvelles formes d’enseignement via les plateformes collaboratives concernent tous les domaines de spécialité, ensuite de contribuer à l’élévation des niveaux de savoir-faire pour la formation des jeunes et en leur apportant des services ajoutés pour une coopération dans les modes de la formation de la communication la plus large pour et entre les usages. Plateforme Moodle Plateforme créée par Martin Dougiamas utilisée dans de nombreuses écoles Collaboration entre enseignants et élèves Moodle traduit dans 90 langues Environ 50 pays partenaires dans le monde Plus de 19 000 cours Plus d’un millions d’usagers
La plateforme Moodle se présente comme une possibilité d’actualisation des connaissances et la formation du plus grand nombre au moindre coût (500 francs CFA la navigation de l’heure, 70 centimes) et de tirer profit des potentialités de la téléphonie mobile. Compte tenu des difficultés & des insuffisances de l’enseignement traditionnel au Congo (manque d’enseignants et de formateurs, manque d’infrastructure adéquate et autres), le Mobile e-Learning est un outil intéressant.
Il s’agit donc de permettre, grâce à un outil accessible pour tous (téléphone), à des populations désavantagées (faibles revenus, isolement) de se former à moindre coût et d’accéder à un meilleur niveau socio-économique.
Développer localement des compétences et des savoir-faire pour mettre en œuvre des activités génératrices de revenus, Il s’agit ici de favoriser l’accès à l’information et à la formation à un grand nombre de personnes, de développer des connaissances et des compétences et de permettre l’accès à des ressources en ligne. Il s’agira également de former tout au long de la vie professionnelle et permettre le transfert de compétences et la valorisation des compétences locales dans le domaine des TIC et du développement durable.
Le téléphone mobile devenant ainsi un instrument d’enseignement qui permet d’accéder à des informations, de partager le savoir. La cible concerne une population jeune et mixte (autant de femmes que d’hommes), des jeunes et adultes qui souhaitent compléter leur formation, des salariés, dans le cadre d’une formation initiale ou une formation continue.
Au niveau économique
Des projets présentés plus haut montrent une prise de conscience de l’Etat congolais des enjeux liés aux technologies de l’information et de la communication. Cependant, cette prise de conscience ne s’est pas accompagnée de mesures significatives au regard du potentiel que recouvre ce secteur par rapport à l’économie et à la vie sociale des habitants. Près de dix ans après l’introduction de la téléphonie mobile en République du Congo, des progrès ont été réalisés en matière d’accessibilité et de coût tarifaire. Le secteur des télécommunications nécessite des investissements importants et les enjeux sont considérables, ce qui ne peut se faire sans l’intervention de l’Etat. Cependant, l’efficacité des services et de leur mise en place suppose une organisation économique. La principale caractéristique du Congo, pour ce qui est des services aux usagers, c’est l’existence de petits métiers et d’entreprise individuelle qui prévaut.
La prise de conscience du potentiel des TIC pour favoriser le développement de nombreux secteurs d’activités et l’émergence de modes d’appropriations innovantes de la téléphonie mobile. De nouvelles alliances sont indispensables, nouvelles associations, de nouveaux partenariats avec le développement des services comme l’envoi de photos et d’images, pour pallier au mauvais fonctionnement des services postaux dans le territoire et entre le Congo et l’international, la TV sur Internet, Ecouter la radio, les discours religieux, les informations de santé publique et de prévention. Des produits dérivés peuvent être commercialisés achat de licence, surtout que le consommateur congolais est très friand de marques (clés USB, MP3, etc.). Ce sont autant de services innovants en relation avec la vie quotidienne qui peuvent rendre plus efficaces les opérations courantes.
La mise à disposition de services innovants est la condition sine qua none pour permettre l’émergence d’autres usages du téléphone mobile. Cette mise à disposition suppose que les opérateurs de téléphonie mobile revoient leur stratégie mais aussi qu’ils associent avec d’autres acteurs des secteurs socio-économiques. Ce qui suppose que des mesures doivent être prises du point de vue de l’information, la formation, de l’éducation pour inciter les habitants à utiliser les technologies de l’information et de la communication et leur faire connaître l’intérêt de l’usage de ces outils. En effet, les citoyens et les pouvoirs publics doivent être mis au courant des TIC et de leurs avantages. Afin d’utiliser ces outils efficacement, les gens ont besoin d’être formés et informés. D’autres mesures doivent être prises pour favoriser le développement des produits et des services et soutenir les acteurs engagés dans ce processus (développement d’infrastructures, logiciels, mesures fiscales, etc.).
L’alliance entre les entreprises de services et les opérateurs de téléphonie mobile peut permettre de faire de la publicité, de la promotion de services. L’information commerciale disponible est généralement destinée à un marché structuré et bien organisé avec des infrastructures assez suffisantes ; ce qui n’est pas le cas avec les économies rurales dans les communautés étudiées qui sont des économies plutôt informelles, dans des situations de «pré-marché» et qui doivent par conséquent trouver des moyens assez novateurs pour s’insérer rapidement dans ce marché plus formel et structuré. L’enjeu ici est de trouver des voies novatrices permettant cette intégration rapide au marché interne et externe dans ces pays.
Les autres entreprises qui peuvent être intéressées sont : les agences de voyage, Instituts de beauté, concessionnaires automobiles, salons de coiffure, prêt à porter, constructions, etc. Si la diffusion des TIC et la multiplication des services sont reconnus par le gouvernement congolais qui y met les moyens, alors cette stratégie pourrait constituer un élément important dans la croissance économique du pays. L’Etat qui va jouer le rôle de mobilisateur devra réunir les partenaires économiques comme les grandes entreprises, les banques, les institutions internationales, etc. Des accords sont indispensables entre des entreprises de plusieurs domaines (informatique, télévision, services aux particuliers, etc.).
Dans certains pays africains, les institutions financières proposent de plus en plus de services de banque à distance, via la téléphonie mobile, afin de développer et de diversifier leurs offres. De nouvelles applications, telles que M-PESA au Kenya par exemple, permettent ainsi le transfert d’argent, l’achat de produits courants comme payer son taxi.
Nous avons débattu de tous ces éléments lors du forum de l’économie numérique, l’arrivée de la fibre optique est importante, la formation est des ingénieurs informatiques ne fait aucun doute mais il faut que les congolais, grands utilisateurs du téléphone portable puissent trouver dans cet outil des services qui vont contribuer de manière significative à l’amélioration de leurs conditions de vie. Le forum a permis de débattre sur les enjeux de l’économie numérique mais il a également permis aux congolais de la diaspora e se retrouver autour de ce thème et d’échanger avec les opérateurs de téléphonie mobile présents.
La responsabilisation du citoyen à l’environnement est importante et le téléphone portable peut être utilisé dans ce sens. Nous débattrons de toutes ces questions lors des « Trois jours Environnement et Développement Durable » qui auront lieu à Pointe du 5 au 8 juillet 2011, co-organisés par l’Ecole Supérieure de Technologie du Littoral de Pointe Noire (Congo) et le Larequoi, Université de Versailles Saint Quentin en Yvelines (France).